12 mars 2007

Dans "Le Monde des Livres" de vendredi dernier...

"Le livre peut-il se passer de libraires ?
Que nous soyons lecteur assidu ou occasionnel, le sort du livre nous concerne tous, car il est le véhicule privilégié de la pensée. Et le sort du livre est lié à celui de la librairie. On peut bien sûr se dire que les difficultés de la librairie (indépendante) sont la rançon du progrès, sans que le monde se porte mieux ni plus mal. Après tout, la Fnac et Virgin - eux-mêmes en difficulté aujourd'hui - ont fait disparaître les disquaires, même si les éditeurs de disques s'en sont mordu - trop tard - les doigts : il n'y a que les "accros" pour accepter de faire une heure de trajet ou plus pour acheter un disque... ou un livre. [...]
Déjà les grands groupes éditoriaux publient, distribuent, vendent et font commenter favorablement les titres qu'ils produisent. La pente est glissante ; si l'on veut tenter de reprendre pied, il est nécessaire d'éxaminer la situation actuelle et, pour ce faire, de rappeler quelques vérites élémentaires que l'on fait mine d'oublier.
Le coût des bons emplacements commerciaux en centre-ville est devenu prohibitif pour les commerces individuels en général et plus particulièrement pour les librairies, car elles sont aujourd'hui le seul commerce disposant d'une marge de 33 %, insuffisante pour payer loyer, salaires, charges, publicité. [...]
Internet enfin permet l'accès au livre que l'acheteur sait vouloir acquérir, mauis ne permet pas de découvrir l'auteur ou le livre inconnu vu par hasard et tenu en mains propres chez le libraire, dont le rôle est d'autant plus important que la production éditoriale augmente : 55 000 livres publiés en 2005, 350 livres nouveaux par jour ouvrable. [...]
Le sort de la librairie ne concerne donc pas seulement quelques boutiquiers un peu en retard sur l'évolution du consumérisme moderne, mais nous tous, et en premier lieu les commerçants qui ont entre leurs mains quelques-unes des clés de la démocratie. [...]
Il faut évidemment mettre fin au système absurde et contre-productif des offices et des retours aussitôt pilonnés dès qu'ils sont revenus chez le distributeur : 60 millions de livres détruits chaque année en France sans que nul ne s'en émeuve. [...]
Le libraire français, actuellement sous-payé et surmené bien que hautement qualifié, ne sera pas fonctionnarisé parce que son bail ou ses murs seront pris en charge par sa municipalité - comme le montre depuis trente ans avec succès le réseau des cinémas Arts & Essais, dont beaucoup de salles sont municipales. [...]
Ces propositions, qui n'ont rien d'utopique, supposent une volonté politique, de l'imagination, quelques moyens budgétaires, la résolution de négocier et une forte dose d'obstination.
Ensuite, nous discuterons jusqu'à plus soif de savoir si Platon est plus lisible sur papyrus ou sur parchemin, en livre de poche ou en Pléiade, voire sur écran tactile, pourvu que Platon ait toujours des lecteurs..."
Baptiste-Marey

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Peut-être faut-il se poser des questions sur la chaîne (dans tous les sens du terme) du livre (auteur/éditeur/diffuseur/distributeur/libraire/acheteur) ainsi que sur la pratique des offices. Si tant de livres voient le jour et meurent avant d’avoir ouvert un œil, étouffés sous la pléthore d’ouvrages, c’est que quelques-uns, dans cette chaîne, ont un intérêt (autre que littéraire) qu’il en soit ainsi. Tiens, si j’étais un éditeur peu scrupuleux, j’organiserais une « rentrée littéraire » en septembre, histoire de placer les 520 bouquins que j’ai fait fabriquer au kilomètre. Me faire payer les offices avant le 31 décembre. Rembourser les retours l’année suivante. De cette manière mon bilan aura de la gueule. Non ? Tagada, tagada, v’là la cavalerie qui arrive…

Coline a dit…

Rassurons-nous, Hervé de la Martinière (patron du groupe De la Martinière - Seuil) nous dit (toujours dans le Monde des Livres, décidément) que tout va bien pour lui et pour sa toute petite structure... Ouf !